O "Le Monde" e o espaço dedicado à morte de Diana

Le Monde 07/09/1997

La disparition de Lady Diana 

Le courrier des lecteurs

Les lecteurs du Monde ont été nombreux à réagir à la mort de la princesse de Galles. Beaucoup d'entre eux jugent démesurée l'importance attribuée à l'événement par la plupart des médias, y compris par Le Monde. Plusieurs lecteurs se disent révoltés par le comportement des paparazzi et par la manière dont la presse porte atteinte au respect de la vie privée. D'autres préfèrent dénoncer l'excès de vitesse qui a provoqué la collision fatale. Quelques uns, enfin, nous font simplement part de l'émotion qu'ils ont ressentie en apprenant cette disparition brutale.

L'avis du médiateur

La mort d'une princesse

par Thomas Ferenczi

LA PLACE accordée par Le Monde à la mort de Lady Diana et de son compagnon, Emad Al Fayed, au lendemain de l'accident tragique du pont de l'Alma, était-elle excessive ? C'est ce que pensent de nombreux lecteurs, qui estiment que notre journal a eu tort de consacrer six pages (quatre dans la séquence «International», deux dans la séquence «Horizons») de ses éditions du 2 septembre à ce qui n'était, selon eux, qu'un fait divers. Ces contradicteurs jugent sévèrement l'attitude de notre journal, auquel ils reprochent de trahir son éthique du journalisme et de participer, comme l'écrit l'un d'eux, à un désolant «renversement des valeurs». Plusieurs d'entre eux ajoutent ne pas comprendre que Le Monde ait choisi de donner la priorité à cet événement plutôt qu'aux massacres survenus l'avant-veille en Algérie.

Ces questions, la direction de la rédaction du Monde se les est évidemment posées. Elle les a soumises, en conférence de rédaction, à la discussion collective avant de prendre sa décision. Tout en comprenant les préoccupations exprimées par nos lecteurs, nous approuvons cette décision, pour des raisons qui tiennent à la fois à l'évolution du journal et au cas particulier de la princesse de Galles. Le Monde a changé. Il n'est pas devenu, comme le prétendent certains de nos correspondants, un journal de l'actualité mondaine, mais il s'efforce d'être plus attentif à certains «faits de société» qui lui paraissent révélateurs de notre temps. A de tels faits, Le Monde d'autrefois aurait sans doute refusé de consacrer plusieurs pages, alors qu'il n'hésitait pas à le faire pour des événements relevant de la politique étrangère ou de la politique intérieure. Cette évolution traduit moins, nous semble-t-il, une trahison de notre éthique qu'un élargissement de notre curiosité.

Le cas de la princesse de Galles est, de ce point de vue, d'autant plus exemplaire que, d'une part, il touche à des sujets auxquels Le Monde s'est toujours intéressé l'avenir de la monarchie britannique, dont on voit bien qu'il suscite des interrogations, le fonctionnement des médias, et la protection de la vie privée, qui sont au coeur de la controverse ; et que, d'autre part, l'immense popularité de Lady Diana mérite à tout le moins qu'on prête attention à sa valeur de symptôme. Oui, l'accident du pont de l'Alma est un fait divers, mais ses significations sont telles qu'elles justifient, selon nous, la couverture dont il a été l'objet. Le traitement des événements d'Algérie appellerait un autre débat. Soulignons seulement que les massacres de Raïs, commis dans la nuit du 28 au 29 août, ont fait l'objet d'un titre de première page et de l'ouverture de la séquence «International» dans Le Monde daté 31 août-1e septembre ; et que, depuis cinq ans que dure la guerre civile en Algérie, de nombreuses pages y ont été consacrées.

Reste, enfin, la question des paparazzi. Il nous semble indispensable de rappeler que le respect de la vie privée fixe des limites infranchissables à l'investigation journalistique. Certes, il n'est pas toujours facile de dire où commence la vie privée des personnages publics. Mais nous donnons raison à ceux de nos lecteurs qui en défendent ardemment le principe. Ce n'est pas, pensons-nous, parce qu'une célébrité construit son image en exposant une partie de sa vie privée qu'elle est obligée de la révéler tout entière ; et ce n'est pas parce qu'un certain public est friand de ces révélations que les journalistes sont tenus de les lui livrer.

Thomas Ferenczi

 * Texto publicado pelo jornal francês LE MONDE

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